17 mars 2020

COVID-19 : Quels éléments socio-économiques guideront la sortie de crise ?

La crise que vit actuellement le Québec – et toute la planète – est inédite et en évolution rapide. Chaque jour apporte son lot de précisions sur la propagation du virus, les responsabilités individuelles et collectives nécessaires pour en réduire les conséquences, les mesures mises de l’avant par les différents paliers de gouvernement ou les ajustements que les organisations apportent à leurs opérations. Cette crise aura un impact inévitable sur le tissu social et économique de nos communautés et les défis qui se poseront à court et moyen terme seront nombreux.

Déjà, plusieurs secteurs d’activité sont mis à mal (réduction significative ou complète du volume d’affaires, disponibilités de la main-d’œuvre, etc.) alors que d’autres peinent à identifier des façons d’opérer dans un contexte où leurs services sont à la fois difficiles à offrir mais toujours aussi essentiels. Ces tendances sont d’autant plus marquées en économie sociale, très présente dans les services de proximité – intégration des personnes vulnérables, petite enfance, aide à domicile ou dans des secteurs comme la culture et le loisir, etc. Dans le contexte actuel où nous sommes tous invités à un effort de distanciation sociale responsable, de nombreuses entreprises d’économie sociale doivent fermer leurs portes de manière temporaire ou voient leur clientèle réduire subitement.

Aux pertes de revenus s’ajoutent les dépenses habituelles qui se maintiennent (loyer, salaires, financement à rembourser, etc.), sans oublier les frais imprévus et supplémentaires qu’engendre une telle crise. Pour la plupart des entreprises, cette période constituera un défi de taille et plusieurs peineront à se relever, ce qui pourrait se traduire par des fermetures permanentes ou la mise à pied d’employés avec la perte d’expertise et d’expérience que cela entraine. À l’instar de nombreuses PME, mais avec un accès à du crédit plus difficile et certaines limitations sur leur capacité à accumuler des réserves importantes, plusieurs entreprises collectives pourraient se retrouver dans une situation difficile à court terme et devront être soutenue adéquatement pour maintenir leurs activités. Pour faire écho aux propos du ministre des Finances, M. Éric Girard, il s’agit ici d’une période de ralentissement économique et non pas d’une « destruction »… Pour autant que ces entreprises collectives, si essentielles pour bon nombre de communautés, ne se retrouvent pas laissées à elles-mêmes.

Depuis le début de cette crise, les différents paliers de gouvernement se sont montrés sensibles aux multiples répercussions de cette pandémie et ont rapidement mis en place des mesures en réponse aux défis émergents, qu’ils soient d’ordre sanitaires, sociaux ou économiques. Au moment d’écrire ce billet, la Ville de Montréal et le gouvernement du Québec annonçait d’ailleurs une série de mesures dont certaines ciblent ou s’appliquent aux entreprises d’économie sociale. Le Chantier suit de près les développements relatifs aux mesures pouvant soutenir les entreprises collectives durant cette période difficile. Vous pourrez d’ailleurs trouver de nombreuses informations ainsi que des ressources pertinentes sur une page dédiée de notre site Internet. Ces informations seront bonifiées au fur et à mesure que de nouvelles ressources seront annoncées ou qu’émergeront de nouvelles informations quant à la nature de l’aide disponible.

Évidemment, le travail du Chantier ne s’arrête pas là. Notre priorité est de faire valoir l’importance économique et sociale des organisations d’économie sociale et de s’assurer que toutes les mesures d’aides gouvernementales prennent en compte leur réalité. Une cellule de coordination a été mise en place afin d’analyser la situation en continu et de déterminer les meilleures actions en cours ou à prendre pour soutenir les organisations de l’économie sociale et trouver réponses à leurs besoins. Nous vous invitons d’ailleurs à nous faire part de vos préoccupations en nous écrivant à info@chantier.qc.ca.

Une fois cette crise passée, nous serons également de la partie pour réfléchir à la suite des choses. Bien qu’on ne sache pas encore complètement ce que nous réserve l’après-COVID-19, il y a fort à parier que la crise aura changé nos perspectives économiques autant que nos perspectives sociales. On est invité – avec raison – à se “serrer les coudes”, entre autres en achetant local. L’occasion est belle de développer le réflexe de considérer l’ensemble des impacts de nos achats (économiques, sociaux et écologiques). Malgré les mesures économiques annoncées au cours des derniers jours pour permettre aux entreprises de souffler un peu, le gouvernement s’est montré réaliste en soulignant qu’elles ne pourront pas toutes être sauvées. Dans les choix qui présideront à l’allocation des ressources publiques consacrées à la relance de l’économie, prendra-t-on en compte la redistribution plus équitable et transparente des profits qu’opèrent les entreprises collectives? Et puisqu’on se soucie particulièrement de l’impact de cette crise pour les commerces en région, est-ce qu’on valorisera davantage l’enracinement local des entreprises collectives? Est-ce qu’on privilégiera  le rôle névralgique qu’elles jouent pour assurer une qualité de vie dans ces communautés? 

Déjà, un élan d’entraide et de solidarité se manifeste au Québec qui nous semble porteur à court terme et inspirant pour la suite. On le sait, la résilience économique et sociale du Québec résulte notamment d’un tissu social en santé, lequel est depuis longtemps « entretenu » par l’économie sociale. Nous sommes des acteurs de changements au service des communautés et nous croyons fermement que le modèle économique doit être transformé pour remettre dans les mains des citoyens les leviers de leur propre développement. Et, clairement, il y a un peu de ceci dans cette crise… elle nous montre que nous sommes collectivement capables de mettre le bien-être collectif avant des considérations strictement économiques.

Soyons solidaires.